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vendredi 6 septembre 2013

TDFête : les relations avec le public

Aujourd'hui, je vais vous parler de nos relations avec le public au cours du Tour de Fête. Par "public", j'entends toutes les personnes sur le bord de la route en dehors des familles des membres du groupe. J'exclus également tous les journalistes.
Pour l'ensemble des images de cet article : © Mickael Bougouin


1 - la répartition géographique et temporelle
On est parti de Corse le dernier week-end de juin. D'une part les vacances scolaires n'étaient pas encore commencées, d'autre part la Corse est une ile et les frais pour s'y rendre sont donc plus importants. Sur le bord des routes, nous avions majoritairement des gens vivant sur place ou des personnes en vacances non liées au Tour. Les gens nous filmaient et nous applaudissaient spontanément, sans vraiment savoir qui nous étions. C'était chaleureux.
De retour sur le continent, les premières étapes ont été relativement désertes. Nous avions des camping cars, principalement belges, dans les côtes et sur les lignes d'arrivée. Ces belges étaient sympas, ils étaient passionnés, mais peu nombreux. Les personnes dans les villes traversées étaient totalement indifférentes à notre passage.
Les 2 étapes pyrénéennes ont été, à mon goût, les deux plus chaleureuses. Le public, principalement basque, était extraordinaire. Deux mois après les évènements, en y repensant, j'en ai les larmes aux yeux. Les deux derniers cols de la 9ème étape (Azet et Ancizan) étaient juste une orgie de supporters déchainés. La musique résonnait dans chaque combe, la route était bordée de chaque côté d'une file continue de personnes qui nous tendaient des bières ou des merguez. Une odeur de barbecue flottait continuellement dans l'air. C'était génial.
Après les Pyrénées, le Tour s'est poursuivi en Bretagne. Les vacances scolaires venaient de commencer, le public était bel et bien présent en nombre. Beaucoup de camping-cars. Beaucoup de drapeaux bretons, normands ou nordistes. Un certain nombre de drapeaux anglais également, probablement car c'était les deux étapes les plus proches de chez eux.
La descente vers le Sud a incontestablement été la zone la plus déserte. Pas un chat entre Fougères et Tours ni entre Tours et St amand montrond. Quelques camping-car entre St pourçain sur sioule et Lyon, mais rien de transcendant. Le calme était aussi plat que les étapes.
On a retrouvé des encouragements en arrivant à proximité du Ventoux. Deux semaines après notre départ de Corse, de plus en plus de personnes étaient au courant de notre passage notamment grâce aux reportages diffusés par France2 et le journal l'Equipe. Le public du Ventoux était très sympa en bas, mais de plus en plus apathique au fil de l'ascension. Dans les derniers kilomètres, à cause du vent qui soufflait et du soleil qui se couchait, le corridor de camping-cars garés de chaque côté de la route était assez calme.
La traversée des Alpes était sympathique, le public était nombreux et chaleureux dans les ascensions. Mention spéciale au fameux "virage des hollandais" dans la montée de l'Alpe d'Huez, où l'odeur de bière était si forte que j'en ai eu un début de nausée ! Au fil des étapes, certains nous interpellaient par nos prénoms : ils nous avaient vus dans les Pyrénées, en Bretagne puis au Ventoux, Embrun et le Semnoz ... certains visages commençaient à nous être familiers. Mais noyés dans la masse des milliers de personnes aperçues, c'était quand même dur de les repérer.
Sur la dernière étape, on a été loin du public. Tout le monde était concentré sur les Champs Elysées, il n'y avait presque personne sur le parcours avant l'entrée dans Paris. Malheureusement, sur les Champs, le public est assez éloigné des coureurs : une double rangée de barrières repousse les supporters à plus d'un mètre de la route. Une partie du parcours est bordée par des tribunes qui étaient désertes lors de notre passage (6h avant les pros) et par des camions de régie. On entendait les encouragements, mais je n'ai pas senti la présence du public.


2 - les supporters gênants
Quand on regarde le Tour à la télé, on est toujours affligé par le comportement de certaines personnes. Certains exhibent fièrement leurs parties génitales, d'autres courent à côté en faisant coucou à la caméra. Ces gens sont surtout attirés par la présence de la télévision, qui leur permet d'accéder à leur fameux "quart d'heure de célébrité" Warholien. Etant donné que nous passions la veille des pros, nous n'avions que des gens passionnés de cyclisme. Pour venir se poster dans le col de Manse ou dans celui du Pilon 48 heures avant le passage des pros, il faut vraiment être féru de vélo ! Pour dormir dans une tente ou dans le coffre de sa voiture à 2000m d'altitude au col de la Madeleine, il faut aimer le vélo ... et ces gens là respectent les cyclistes.
Nous n'avons donc pas eu de débordements stupides. Nous avions des gens parfois peu habillés, parfois alcoolisés, mais jamais gênants.


3 - les supporters de David Moncoutié
Dans le monde du vélo, David Moncoutié est une star. Une star discrète, loin de faire des vagues et de grandes déclarations, mais une star aimée par le public. Fraichement retraité du peloton professionnel, les passionnés du Tour de France l'attendaient tout de même dès qu'ils ont eu vent de sa participation au projet du Tour de Fête. Combien de fois ai-je entendu "Où est David ?" quand il n'était pas dans mon groupe, et "Allez David" quand il y était ?
Certains nous ont beaucoup fait rire. Il y a eu ceux qui lui courraient loin derrière en plein col tout en criant pour réclamer une photo. Ceux qui nous ont le plus amusé sont ceux qui venaient nous voir en nous disant "Salut David, je suis un de tes grands fans, j'ai suivi toute ta carrière, je peux avoir un autographe ?" ... mais qui disaient ça à une autre personne que lui !
Au bord de la route, nous apercevions parfois des camping-cars entièrement décorés à l'effigie de la Cofidis. Pour nous amuser, on leur indiquait parfois "David Moncoutié est dans le prochain groupe qui passera, encouragez le". Certains étaient contents d'être informé, d'autres nous ont insulté en croyant qu'on se moquait d'eux.


4 - la notion de distance dans un col
Quand on fait du vélo, on sait que les non-cyclistes ont une fâcheuse tendance à se tromper dans les distances quand ils nous renseignent. A l'entraînement dans des régions que je ne connaissais pas, combien de fois on m'a dit de faire "2 kilomètres et de tourner à gauche", quand il fallait en réalité en faire 5 ? Les gens en voiture ne savent pas vraiment à quoi correspond un kilomètre, les distances sont toujours faussées par la vitesse du véhicule.
Le public étant très nombreux dans les cols, on trouvait toujours du monde pour nous encourager spontanément. Et sans qu'on demande, certains nous disaient "Allez, courage, plus que 5 kilomètres" ... on faisait 1km et un panneau au bord de la route nous indiquait que le col était à 5 kilomètres. C'est le genre de chose qui te plombe le moral, mais heureusement il y avait toujours d'autres supporters juste après le panneau pour nous dire "Allez, c'est bientôt fini, c'est plus facile à partir de maintenant". C'était rarement plus facile physiquement, mais leur présence à tous nous aidait à trouver les choses plus faciles. On ne peut pas poser pied à terre quand 50 personnes nous regardent ! Alors on continue jusqu'au col, qu'il soit à 5 "kilomètres-supporter" ou à 5 "kilomètres-officiel". Une fois au col, on pouvait s'arrêter et soulager nos muscles.


5 - "un bidon ! un bidon !"
La majorité des personnes qui nous parlaient le long de la route nous encourageaient. Ils ne savaient pas forcément ce qu'on faisait, mais ils aimaient les cyclistes et encourageaient tous ceux qu'ils voyaient passer. De temps en temps, au milieu des "bravo" et des "allez", il m'arrivait d'entendre "un bidon ! un bidon !". Sans aucun mot d'encouragement ni aucune formule de politesse. Des bidons, on en a tous donné. Sur les arrivées au sommet, je les donnais aux spectateurs quand je les terminais : ça me faisait toujours ça de moins à monter.
On avait aucune envie de donner un bidon à quelqu'un qui nous le réclamait. On les donnait aux gens qui nous applaudissaient et nous encourageaient. Ces gens jouaient le jeu, c'était normal de leur le donner à eux plutôt qu'aux gens qui n'étaient là que pour réclamer un morceau de plastique rond. S'ils veulent absolument un bidon, ils peuvent aller à Décathlon, ça leur coutera 5 euros ! Mais il est vrai que des cyclistes totalement inconnus n'auront pas bu dedans ...


6 - le Tour, une histoire de famille
Le Tour est une affaire de famille. La veille, on ne voit pas de personnes seules : on voit des couples (avec ou sans enfants), on voit des groupes d'amis, ... mais personne seul au bord de la route. On voit donc des couples de retraités (ou proches de la retraite), en camping-car ou dans des tentes, avec souvent un bon équipement pour l'attente. On voit également beaucoup de couples de trentenaires avec de jeunes enfants, majoritairement dans des camping-cars. Enfin, on rencontre un certain nombre de groupes d'étudiants, toujours en camping sauvage et avec peu de matériel : une tente, un réchaud à gaz ... et de l'alcool ! La tranche la moins bien représentée est celle des 35 à 50ans, suivie par la tranche des adolescents (14-20ans).


7 - conversations avec le public
Pour moi qui ai toujours des blagues à faire ou à dire, le Tour a été un festival ambulant pendant 3 semaines. Il faut dire que certaines scènes vécues avec les personnes sur le bord de la route valaient le détour. Je passerai sur les blagues faciles quand les personnes lisaient le journal. Idem avec les facteurs / factrices croisé(e)s, à qui je demandais s'ils avaient du courrier de fans à me remettre, et s'ils en avaient de le faire suivre au facteur d'une des villes du lendemain.
A la vitesse à laquelle on grimpait les cols, on avait le temps de discuter avec les gens au bord de la route. Les moments les plus drôles étaient souvent le matin, quand on passait tôt et que la voiture ouvreuse mettait un coup de klaxon en passant devant les camping-cars. Les gens sortaient en vitesse, paniqués, en croyant que c'était la caravane publicitaire qui était en train de passer. On a également vu des campeurs sortir la tête des buissons ou remonter rapidement une pente avec un rouleau de PQ à la main. Je ne sais pas combien j'ai refusé de bières, ni combien de "bon appétit" j'ai dit en salivant en regardant la viande griller sur le barbecue.
Le sommet des cols et les arrivées d'étapes étaient les zones les plus propices pour discuter, puisqu'on s'y arrêtait à chaque fois pour se ravitailler et attendre les derniers. C'était souvent à cet endroit que les conversations étaient les plus étoffées et tournaient principalement sur le but de notre périple. Les questions étaient souvent les mêmes, au fil du temps notre discours se rodait, mais on répondait toujours avec le sourire.


8 - Tour de France et Tour du monde
Faire le Tour de France, c'est aussi faire une sorte de Tour du monde. A l'approche de St Malo, j'ai roulé en discutant avec une anglaise. J'ai grimpé le Ventoux en discutant avec une polonaise. En haut, j'ai discuté avec un tchèque puis deux australiennes. Tout au long des 3400 kilomètres parcourus flottaient des drapeaux de tous les pays : USA, Canada, Brésil et Colombie pour l'Amérique, Australie et Nouvelle-Zélande pour l'Océanie, Espagne, Italie, Belgique, Pays-Bas, Norvège, Angleterre, Allemagne, Slovaquie et Suisse pour l'Europe. Le continent le moins bien représenté était l'Asie : les asiatiques étaient peu nombreux sur le bord de la route.

Vous pouvez consulter ici l'ensemble des articles consacrés au Tour de Fête.

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