Après une courte nuit, la chaleur m'empêchant de trouver le sommeil, j'ai pris la route en compagnie de Guillaume. Après avoir assisté au lever de soleil depuis l'autoroute, nous sommes arrivés à Bédoin à 7h40. Il faisait déjà 27°.
Comme la pluie menaçait de tomber, on est parti directement à l'assaut du Ventoux. Sans échauffement, la fleur au bout du fusil. Les premiers kilomètres ne sont pas difficiles, c'est globalement assez roulant. La route offre une vue dégagée vers le sommet, ce qui m'a fait penser à la célèbre phrase de Napoléon : "Soldats, songez que, du haut de ces pyramides, quarante siècles d'histoire vous contemplent !". Je ne sais pas depuis combien de décennies le Mont Ventoux contemple les cyclistes, mais une chose est certaine : nous n'étions pas les premiers à nous y attaquer ! Et nous ne serons pas les derniers.
On s'est pris un vent de travers défavorable, rien de très méchant, mais suffisamment méchant pour ralentir notre progression. Au virage de Ste Estève les choses sérieuses commencent : la route s'enfonce dans la forêt et la pente devient rude jusqu'au sommet. Je n'avais pas de très bonnes sensations lors de la phase d'approche, ces mauvaises sensations se sont confirmées : en l'absence de vent, et dans une pente constamment entre 8 et 10%, je ne me suis pas senti pas aussi à l'aise que lors des semaines précédentes.
J'ai grimpée à mon rythme et ai tenté de mémoriser le maximum d'informations utiles. Zones plus difficiles, zones plus faciles, virages, ... après 220km, en fin d'après-midi, en fin de 2ème semaine du Tour, cette montée risque de ressembler à un chemin de croix caniculaire. Les repères pris aujourd'hui seront vraiment utiles pour la gestion de mon effort dans 20 jours. J'ai ralenti à un moment pour discuter avec un cycliste français qui a engagé la conversation en me posant des questions sur mon braquet. Ca m'a presque surpris d'entendre parler français : depuis le départ, nous n'avons vu pratiquement que des étrangers, principalement hollandais.
Un peu avant le chalet reynard, un panneau de limitation à 50km/h m'a fait sourire. Dans une pente à 10%, je n'ai pas eu besoin de freiner pour respecter la consigne. Les ouvriers de la DDE étaient pleins d'humour : ils ont dit à Guillaume "pour monter à cette vitesse, tu dois avoir un moteur électrique" et m'ont dit "toi, pour prendre des photos en grimpant, tu dois être chargé". C'était sympa de leur part, ça nous a fait rigoler, et ils nous ont encouragé de manière plus traditionnelle en tapant dans leurs mains et en nous souhaitant bon courage.
Arrivé au chalet reynard, la pluie et le vent ont fait leur apparition. Le vent était de 3/4 favorable donc c'était sympa. La pluie était légère, donc pas spécialement gênante. Jusqu'au col des Tempêtes, à 800m du sommet, tout s'est bien passé. En revanche, au moment de passer au col, le vent est devenu très violent : une première rafale m'a fait traverser la route en moins de 5 secondes. Une seconde rafale m'a projeté contre le parapet. Le vent devait souffler à plus de 100km/h. Ces 800 derniers mètres ont été compliqués à grimper, j'ai été obligé de m'arrêter deux fois pour ne pas tomber à cause du vent, et repartir dans une telle pente n'est pas facile. Les cyclistes qui descendaient étaient tous à pieds, personne n'a osé descendre à vélo cette portion.
On a fait quelques photos en haut pour immortaliser notre ascension. On est pas resté longtemps : avec une température de 10° au sommet, contre 27° au départ, c'était un sacré choc thermique. Le début de descente a été difficile à cause du vent, mais on s'est rapidement retrouvé protégé par la montagne puis par la forêt. Une très grosse averse s'est déversée à mi-pente, on s'est retrouvé trempé en moins de 20 secondes. Ca m'a fait rigoler, car quand j'inclinais la pointe du pied vers le bas, je voyais un torrent d'eau s'écouler de ma chaussure.
Quand on est arrivé en bas, la pluie s'est arrêtée et le vent était léger. Comme il était assez chaud (25°), il nous a séché rapidement. On a poursuivi la reconnaissance de la partie d'approche du pied du Ventoux : je ne me souvenais plus de la difficulté du col de la Madeleine, qui précèdera la montée du Ventoux lors de l'étape du Tour reliant Givors au Mont Ventoux.
Cette reconnaissance a été instructive. J'ai fait l'ascension en 1h39, bien loin de mon record (1h21), mais à une vitesse ascensionnelle de 950m/h, soit une vitesse pas si ridicule que ça. J'ai eu un jour sans, ça arrive et je ne pense pas que ce soit inquiétant. Ma préparation pour le Tour de Fête est terminée : j'ai fait ce que j'ai pu en fonction de mes disponibilités, je vais désormais compter sur ma bonne étoile pour veiller sur moi et me permettre d'aller au bout de l'aventure.
En tout cas, une chose est sure : le Ventoux est un mythe qui fait vibrer les cyclistes. Les conditions météo n'étaient pas terribles, pourtant on a croisé des dizaines de cyclistes. On était loin des affluences de juillet, mais j'ai quand même été impressionné par le nombre de personnes qu'on a croisé, qu'on a doublé et qui nous ont doublé. Le plus impressionnant, c'est de voir le nombre de personnes qui sont à pieds ou au ralenti dans les premiers kilomètres. Je loue leur abnégation et leur mental, car quand on en bave dès le pied il faut être costaud mentalement pour accepter de rester 4h dans une montée, aussi mythique soit-elle. Chapeau et respect à eux.
Consultez les données de notre sortie.
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Salut Florent,
RépondreSupprimerJe te souhaite bonne chance pour ton Tour de Fête. Tu vas vivre une aventure exceptionnelle à tous points de vue.
Au-delà du seul aspect sportif, je pense que c'est une grande chance que tu vas avoir de côtoyer Eric Fottorino. Je suis en train de lire "Petit éloge du Tour de France" que l'on m'a offert pour combler mes longues journées de convalescence, et je dois dire que je me régale, comme je m'étais déjà régalé à lire deux de ses précédents ouvrages également consacrés au vélo.
Monsieur Fottorino est un très grand auteur, et je suis sûr qu'il t'enrichira de son savoir.
Salue-le de ma part et je compte sur toi pour pédaler pour deux dans les moments difficiles, en ayant une pensée pour moi qui vais passer tout l'été cloué au lit !
A bientôt
Franck
Salut Franck,
RépondreSupprimerJe viens d'aller lire le récit de ton accident. Je te souhaite un bon rétablissement, commence par retrouver la santé, pour un retour sur le vélo tu aura le temps d'y réfléchir une fois que tu sera chez toi. Quand je serai en difficulté, promis je penserai à toi et je me dirai que dans le fond, grimper un col est toujours moins dur que de devoir rester alité.
Pour Eric Fottorino, je pense que ce ne sera pas le seul "grand monsieur" que je vais rencontrer au cours de l'aventure. Je pense qu'à la fin du périple, on en sortira tous grandis ;-)
Bon courage à toi,
Florent